« Quand je rentre dans les ordures et que je récupère des objets, j’ai une fierté parce que derrière ces ordures il y a plein de choses, il y a beaucoup d’instructions »

En Mauritanie, une femme lutte contre les changements climatiques par le billet de l’art. Elle a créé son entreprise, RIM ART DECO qui œuvre dans la récupération  et la transformation de déchets solides en mobiliers décoratif des maisons, des hôtels, des bureaux et espaces publics… Elle s’appelle Madame Fatimata Kane, c’est la pionnière du design conjugué au féminin  dans le pays. Nous l’avons rencontré en marge de l’expo du Conseil Mauritanien des Femmes d’Affaires, organisé courant mois de Novembre 2022 à Nouakchott.

THIASKI : Comment présentez –vous votre entreprise ?

Fatimata Kane : RIM ART DECO RECYCLAGE est née d’une volonté de réduire la pollution visuelle due à l’utilisation abusive des matières plastiques en Mauritanie en particulier, et en Afrique subsaharienne en général. Notre démarche s’inscrit dans le cadre de notre contribution à l’atteinte des Objectifs du Développement Durable. Nous voulons aussi être acteurs dans le processus de prise de conscience des mauritaniens sur les enjeux environnementaux, et à l’économie par le billet du recyclage.

THIASKI :   Arrivez – vous à vivre uniquement de vos activités ?

Fatimata Kane :  Nous avons beaucoup de peines à vivre uniquement de notre art car nos produits ne sont pas toujours vendus à temps. Oui, c’est difficile de vivre de ce travail mais on essaie de créer et d’avoir d’autres boulots parallèles pour joindre les deux bouts.

THIASKI :   Entant que femme artiste, ou femme d’affaire ou femme chef de famille ou même femme au foyer pour la plupart, comment arrivez- vous à jongler entre ces différentes réalités ?

Fatimata Kane :  Je vous dis que dès fois c’est compliqué mais tout dépend de l’homme que l’on rencontre. Quand on arrive à avoir quelqu’un de compréhensif, une personne qui voudrait vous voir réussir car le travail d’une femme apporte une valeur ajoutée à la famille même si ce sont seulement ses affaires personnelles qu’elle gère, la femme a un apport positif, elle bouche quelques trous. Je pense que de nos jours il n’ya plus aucun homme qui souhaiterait avoir une femme juste au foyer car dans la vie d’un couple, tout doit se gérer  à deux.

THIASKI :   Vous,  entant que femme active dans l’art de la récupération, quelles sont les difficultés que vous rencontrez chaque jour ?

Fatimata Kane : L’accompagnement des bailleurs nous manque beaucoup du point  de vue de la logique et du recrutement du personnel car  la récupération nécessite plusieurs équipes et surtout le transport  des objets qui sont souvent lourds. Mais du point de vue personnel, je suis arrivée à casser les barrières en acceptant de descendre dans les ordures malgré les griefs de certaines connaissances qui m’ont épinglé sur mon statut de grande dame et de femme d’affaire. Elles ignorent tout de mon ressenti en ce moment. En effet  quand je rentre dans les ordures et que je récupère des objets, j’ai une fierté parce que derrière ces ordures il y a plein de choses, il y a beaucoup d’instructions … en fouillant les ordures je contribue à la protection de notre environnement. Je crée à travers cette activité l’emploie des jeunes. Je contribue à l’autonomisation des filles et de femmes. Les plus grandes difficultés que nous rencontrons sont la valorisation et la commercialisation de nos produits car l’art du recyclage est nouveau chez nous par rapport aux pays qui nous entourent.

Propos recueillis par Yéro NDiaye